Appelez-moi Amour

[suite et fin]

***

- Oula, ça va pas fort toi, on dirait, me dit Marilou, comme pour me saluer alors que je m'asseyais à côté d'elle dans le bus.
- Pourquoi tu dis ça ? demandais-je, assez hypocritement.
La réponse, je la connaissais. J'avais une tête endormie, j'étais mal coiffée et par dessus tout mon caractère de cochon battait des records ce matin mais je n'avais pas spécialement envie que Marilou le remarque, surtout si vite.
- Oh, pour rien... répondit-elle en chaussant les écouteurs de son I-pod dans ses oreilles.
C'est à ce moment-là que je me suis rappelée de l'existence du mien. A vrai dire, il ne me servait pas à grand chose. Un I-Pod, c'est quand la musique nous tient à coeur, que c'est important pour nous et pas parce que l'on veut écouter quelques fois deux rares chansons qui nous émeut. Mais ça, Sarah ne l'a pas comprit. Elle a sans doute cru bien faire : les I-Pod sont demandés par tous ados normalement constitué. N'a-t-elle pas encore compris que je ne suis pas normalement constituée ?
- T'écoutes quoi ? me demanda Marilou, en voyant mon I-Pod flambant neuf.
Vous savez, quand vous mettez la musique un peu fort, une personne vous pose une question et que vous y répondez en parlant fort, trop fort, en criant presque, en mettant un terme à votre vie sociale ? Eh bien, je l'ai fais.
- Euh... Je sais pas trop... répondis-je déclenchant l'hilarité de tous les occupants du bus à cette heure matinale.
Marilou ne put retenir un fou rire. Moi, j'avais presque envie de pleurer ; cette journée délicieuse et mystérieuse qui devait m'attendre était bien loin maintenant, elle avait laissé place à une journée en enfer - pour changer. C'était étrange à dire, mais il me semblait que pour Marilou et moi soyons amies, il fallait d'abord qu'on apprenne à se détester. Et une fois qu'on en aura eu marre de ses enfantillages, on deviendra soudées, soudées, soudées. Il fallait qu'on s'envoie des insultes à la tête, comme pour prouver qu'on était pas contente de notre vie actuelle, avant de pouvoir aider l'autre. Etrange, certes, mais quand on est pas normalement constitué, tout est possible. Et puis, pour la première fois de ma courte vie, j'avais l'impression de sauter dans l'inconnu, et c'était fou ce que ça me plaisait.

Nyaaaaah continue!! *-*

Génial ce chapitre.
HS : /me aussi veut un I-pod T-T

Superbe ! *___*

*veux la suite*

Merci toutes les trois, le chapitre suivant est en préparation, je pense le poster demain ou ce week-end ^^

EDIT// Ah ah Mathilde, on en veut toutes xD (moi j'en ai un mais c'est le petit, le shuffle ça me convient déjà parfaitement =p)

Je ne sais pas vraiment pourquoi Marilou me paraissait si intouchable. Peut-être que ce qui m'effrayaient c'est qu'elle ne cessait de lancer des appels silencieux pour qu'on l'aide, pour qu'on l'aime. Comme je le faisais. J'avais lu dans un magasine (pas très intelligent mais quand même) que lorsqu'on se ressemblait trop, on avait du mal à se supporter mais que lorsque l'on était trop différentes, ça ne marchait pas non plus. Tout ceci me fit avoir un peu plus de pensées dans la tête. Mais l'espagnol ne m'avait jamais réellement passionné, sûrement parce que dès le premier jour le professeur m'avait dit :
"Maiiiis Señorrrrita, un petit efforrrrt voyons, c'est simple pourrrrtant ! Votrrre accent est mauvaiiiis ! Prrrrenez exemple sur Kate !"
Avec son accent espagnol à deux sous, il n'avait rien de très latino. Et il s'était à tout jamais fritté avec moi. Tout ça parce que je ne savais rouler les "r". Non mais franchement, qu'est-ce qu'on s'en moque ?
Marilou, elle (histoire de nous différencier un peu plus encore), semblait prendre plaisir à ce cours presque malsain.
- Me extrañan las repuestas de Don Ramon porque es escritor pero no sabe leer ni escribir, triompha-t-elle avec un petit sourire satisfait.
- Siiiiii, muy bien Señorrrrrrita Marrrrrilou ! s'extasia le professeur.
Je poussais un soupir méprisant. Marilou l'entendit et le prit pour elle. Elle me répondit par un autre soupir, mais un soupir fier, presque prétentieux. On rigole pas avec Miss Españole, hein.
Malheureusement, l'espagnol a tout de même une importance dans la moyenne générale, m'obligeant donc à "fayoter" trois heures de plus parce semaine.
- Alice, por favor, me désigna M. Tournes, comme s'il avait lu le contrat mental que je m'étais fixé.
Seulement voilà, je n'étais pas totalement réveillée ce jour-ci et je fis l'erreur (humaine mais stupide) de répondre en anglais.
- Yes, mister, répondis-je avec un accent parfait. What do you want I do ?
- Señorrrita Alice ! Vous ne faites aucun efforrrt ! s'énerva le professeur, exaspéré que je ne réussisse pas. Je vais êtrrrre obligé de vous demander votrrrre carrrnet !
Bien joué Alice. En deux jours seulement, j'aurai récolté mes deux premières de colle. Etais-je en train de virer du côté obscur de la scolarité ? Si c'était la condition pour sauter dans l'inconnu et fréquenter Marilou, peut-être que cela ne valait pas le coup. Une amitié, ça doit être un bonheur, il ne faudrait pas cela me pèse sur les épaules et que je doive quitter mes atouts pour l'obtenir. Je lançais un regard désolé vers Marilou, comme si j'avais décidé d'abandonner ou que je savais que cela ne servait à rien. Marilou décida alors de tourner à ce moment les yeux vers moi. Elle me lança un regard qui en disait long sur elle : elle me suppliait intérieurement de ne pas renoncer, mais paradoxalement ce regard était plein d'assurance. Il me disait de ne pas perdre espoir en notre amitié, en moi. Il n'y avait pas de hasard, je n'avais donc pas rencontrer Marilou en vain. Et c'est ça qui était magique avec Marilou, c'est qu'en quelques secondes, avec un seul regard, elle remettait confiance à tout le monde et particulièrement à moi. Si vous saviez comme ce regard m'a aidé, à ce moment là, à affronter une fois de plus le regard des autres alors que je tendais mon carnet au professeur.

[suite]

***

- Tu m'as pas répondu, s'obstina Marilou. Qu'est-ce que tu écoutes sur ton I-Pod ?
- Oh euh, rien, répondis-je, vague.
- C'est pas une réponse. Je vais pas te manger, tu peux me le dire.
Ca me semblait tellement débile de dire ce que j'aimais. J'étais sûre qu'elle trouverait ça ridicule et ne se gênerait pas pour le montrer. Parce que moi, j'écoute pas du rock comme tout le monde.
- Eh bien euh, j'écoute euh... Olivia Ruiz, Camille et euh... un peu M, bredouillais-je en jetant un regard accusateur à mon I-Pod vert.
Marilou ne fit aucun commentaire, elle se contenta de sourire. On lisait clairement dans ses yeux qu'elle était surprise que j'écoute ce genre de musique.
- Et toi ? demandais-je brusquement, en rompant le silence qui s'était installé dans le bus.
- Moi ? Oh, des choses bizarres.
Apparemment, aucune de nous deux aimait s'étendre sur sa personne. Mais moi, je n'insiste pas quand on refuse de me dire un truc. A chacun son petit jardin secret. Je tiens à conserver celui des autres pour mieux protéger le mien.
Le bus semblait respecter nos soupirs, nos phrases en suspend et ne parlait pas quand nous n'arrivions pas à parler, comme des spectateurs retenant leurs souffles avant la prochaine réplique d'un acteur de sitcom. Cette situation était terriblement gênante, nous avions -du moins j'avais- l'impression d'être épiée, analysée, jugée. C'est à ce moment là que je me rappelai que ma tante me trouvait terriblement paranoïaque et que je devrais moins penser.
Marilou sortit un livre qu'elle commença à lire. Mais quelque chose ne collait pas. Elle ne semblait pas réellement lire, elle ressemblait plus à une espionne qui observait un suspect ou à Sarah lorsque qu'elle veut penser en paix. Je fis comme ci ne rien n'était et je me tournais vers la fenêtre, regardant ce paysage si familier défilée. J'étais née à la campagne. J'avais quelques fois déménager mais je ne partais jamais bien loin : j'allais toujours dans la ville d'à-côté. Je reconnus tout de suite où nous étions en ce moment, près de chez moi. Je commençais à mettre mon manteau et je me levais précipitament. Je n'avais jamais aimé le bus et le fait que quelqu'un soit assisse à côté de moi- même mon idole- me rendait terriblement mal à l'aise.
- On dit pas au revoir ? me dit Marilou, me ramenant à la réalité.
Je bredouillais une sorte de purée de mots qui ne voulait rien dire de particulier ni en français, ni dans une quelconque autres langues. Marilou imita à la perfection mon petit dialogue d'excuse et me fit la bise. C'était très étrange car personne à part Sarah ne l'avait fait auparavant. Je sortis du bus en aillant l'impression d'être quelqu'un.

[suite]

***

- Là n'est pas le problème Sarah ! tempétais-je, les dents serrés.
Ma tante fit semblant de ne pas m'entendre, trop absorbée par les ingrédients des yaourts bio. Je lui pris brusquement les yaourts des mains pour qu'elle m'écoute.
- Sarah ! Ecoute-moi ! J'ai le droit de savoir où tu étais hier ! dis-je en réduisant à moitié les yaourts en compote en les posant dans le caddie.
- Et moi j'ai le droit de préserver ma vie privée, répondit-elle, gênée, en poussant le caddie devant elle.
Je restais sans bouger la regardant s'éloigner. J'avais la désagréable impression que c'était réellement ce qu'elle voulait : s'éloigner de moi. Et pas que dans ce supermarché, dans notre vie entière en générale. Un mélange de colère et de tristesse infinie me fit une boule dans la gorge, étouffante. Je me mis alors à courir derrière elle, sous les yeux étonnés des autres clients.
- Sarah... Tu m'avais fait un sandwich au jambon hier... déclarais-je d'une voix tremblante. Et tu vas me dire qu'il n'y a rien ?
J'avais les larmes au yeux. Ma tante, si elle allait bien, n'aurait jamais oublié mon amour pour les animaux et mon refus à manger toutes les viandes de notre vaste Terre. Sarah s'arrêta, cherchant en vain une explication logique.
- Ecoute ma puce... Je n'avais pas la tête à ça, répondit-elle en me caressant les cheveux.
Je retirais ma tête à la vitesse de la lumière. Je ne voulait pas que ce clone de ma tante me touche. Non, c'était impossible. Sarah... Si je te perds toi, je perds tout. Elle devait sans doute croire que je ne comprenais pas ce qui lui arrivait mais pour moi tout était très clair. Elle voyait un homme, elle sortait avec lui, comme une adolescente. Je ne pouvais pas vraiment le lui reprocher mais je lui en voulait car tout allait changer. Notre petite vie allait être bouleversée à tout jamais. Je ne voulais pas de ce futur oncle. Ma tante me convenait bien déjà comme ça. Je n'avais pas choisit un lot mais ma tante. J'avais envie de pleurer, pleurer pour notre avenir, sur ma vie sans rebondissement qui me convenait très bien et pour la lâcheté de ma tante. Je l'aurai bien fait si je n'avais pas eu peur de briser mon image de fille sans coeur. Or une fille sans coeur, ça ne pleurs pas.

[fin du chapitre 6]

Génial, vivement le 7

Je me tenais toute raide sur l'un des nombreux bancs en béton qui ornaient notre petite cour. Marilou déclara d'une voix qui se voulait sérieuse ou comique (je n'avais pas bien compris la subtilité) :
- Bien. Analysons le "problème Alice" je vous pris.
Elle s'arrêta un petit moment pour faire monter le stress en moi.
- Je vais être obligée de vous poser une série de questions très personnelles, continua-t-elle en remuant nerveusement son stylo. Etes-vous d'accord ?
- C'est la première question ? dis-je timidement, essayant de faire de l'humour.
- Si on veut, continua Marilou, le sourire aux lèvres.
- Eh bien d'accord, dis-je, commençant à comprendre l'humour de Marilou.
Marilou regarda attentivement la série de questions qu'elle avait soigneusement écrite la vieille. C'était assez étrange en fait. Lorsque j'étais arrivée dans le bus ce matin, elle semblait surexcitée et très fière d'elle à la fois.
"Je t'ai bien observé, j'ai bien vu que tu avais besoin du docteur Marilou" avait-elle simplement dit. Et dès la première récréation, elle m'avait confortablement installé pour me poser des questions. J'avoue que je ne comprenais pas bien.
- Commençons par les bases, dit-elle en lisant son questionnaire. Nom, prénom et date de naissance.
- Gilbert Alice, née le 11 avril 1992, répondis-je, intriguée.
Marilou nota les informations à toute vitesse tout en lisant la seconde question :
- Nom et profession des parents.
Gros blanc. D'un côté je ne lui en voulait pas, elle ne pouvait pas savoir. Mais n'empêche, ça ne faisait jamais du bien ce genre de questions. Marilou releva doucement les yeux de son papier, comprenant qu'elle avait fait une bêtise.
- On.. on peut la sauter, soufflais-je lentement, sentant les larmes venir.
Marilou acquiesça, compréhensive. Elle me semblait tellement me comprendre que je m'en voulait presque de ne pas lui expliquer pourquoi je ne souhaitais pas répondre.
- Hum. Question 3 : Passe-temps préféré ? continua Marilou, un peu moins enthousiaste.
- La lecture, répondis-je doucement.
Elle semblait en attendre plus. Après avoir attendu un petit temps elle haussa les sourcils et reporta ma réponse. Le cas Alice, c'est sérieux, hein ?
- Tu as déjà eu un copain ?
- Non, dis-je précipitamment, comme terrorisée par ce rêve inaccessible.
- Ok, insista Marilou, mais ça te plairait ou pas d'en avoir un ?
- Je sais pas.
- On a toujours un avis, même s'il est complètement dingue.
Cette idée me plaisait bien. Après tout, elle n'avait pas tord. J'avais toujours un avis sur tout, même s'il n'était pas très intelligent ni constructif, j'avais un avis. Je ne savais pas ce qui me retenait d'exposer tous ces avis qui grouillaient en moi sans pouvoir sortir, me donnant des migraines.
- Bon ok... oui ça me plairait, ai-je admis.
- Elle avoue ! s'exclama Marilou en rigolant.
Je fis un petit sourire timide.
- Et euh...
La cloche retentit faiblement et je fus sauvée pour un petit temps de la prochaine question. Même si je faisais semblant de ne pas apprécier les efforts de Marilou, j'étais folle de bonheur au fond de moi d'intéresser enfin quelqu'un, surtout après mettre sentie profondément délaissée par ma tante indigne.

[suite]

***

- Et lui là ? proposa Marilou en désignant discrètement Bastiste du menton.
- T'es dingue ! m'exclamais-je (en chuchotant toute de fois). C'est un crétin infini !
Marilou explosa de rire.
- Quoi ? Qu'est-ce qui te fais rire ? demandais-je, riant presque en la voyant rire.
- Rien, je me disais juste que vous iriez bien ensemble, reprit-elle, en pouffant.
- Qu'elle est ce sous-entendu ? rigolais-je à mon tour.
On était en anglais et le cour était tout simplement insupportable car nous étions censé corriger des exercices. Et comme ni Marilou ni moi n'avions de problème en anglais, Marilou avait décidé de me trouver un copain.
J'étais tout le temps surprise lorsque j'étais avec Marilou. J'avais l'impression que je ne connaîtrais jamais totalement toutes les facettes de sa personnalité. Je n'avais jamais connu ça auparavant, bercée par la routine qu'avait installé ma tante et je devais admettre que le changement avait parfois du bien. Sauf quand c'est les autres autour de nous qui change, vous forçant à changer avec eux, comme ma tante le faisait.
- Oh, à moins que tu aimes déjà secrètement quelqu'un, déduisit Marilou avec un sourire triompheur.
- Alors là tu fais fausse route, répondis-je en tentant d'être crédible.
- Oh oh ! continua-t-elle en me désignant d'un doigt accusateur. Vous me cachez des choses Miss Gilbert !
- Non, pas du tout, me défendis-je, en rougissant.
Marilou m'observa en souriant. Elle lisait en moi comme dans un livre ouvert. J'étais amoureuse. Mais pas de quelqu'un du collège, pas de quelqu'un que j'aurai rencontrer durant les vacances, pas d'une célébrité. Aussi débile que ça puisse paraître, j'étais amoureuse d'un héros de bande-dessiné. Oui, j'étais folle du Petit Spirou allez savoir pourquoi. Sûrement parce que moi j'étais tout le contraire de lui.
- Qui est l'élu de ton coeur ? demanda Marilou, la bouche en coeur, en papillonant des yeux, comme dans les films à l'eau de rose.
J'éclaicis ma voix. Je sentais bien que le regard de Kate et d'autres pestes de la classe étaient fixés sur nous. Après m'avoir vu plus m'amuser qu'eux (c'était inadmissible !) ils voulaient savoir qui j'aimais pour mieux me ridiculiser.

[suite et fin]
- Ok, plus tard, devina Marilou en suivant mon regard.
Je ne pense pas que notre professeur fit exprès, elle commença à nous demander un exercice sur les meilleurs amis.
- Décrivez oralement votre meilleure amie, je vais vous noter et cela vous fera une note sur 20 à mettre dans le carnet, nous rappela mollement Mme James.
Quelques élèves échangèrent des coups d'oeil affolés autour d'eux.
- Vous deviez savoir décrire une personne pour aujourd'hui, souligna-t-elle, histoire que tout soit clair.
Elle ouvrit le cahier de textes de la classe et regarda la fiche de nom. J'étais sûre qu'elle me choisirait en première parce que ça la rassure de faire passer une bonne élève en premier, afin que tous les autres comprennent bien l'exercice. C'est injuste mais il en a toujours été ainsi avec Mme James.
- Alice, tu commenceras, m'ordonna-t-elle, comme pour vérifier mon hypothèse, avec un demi-sourire.
Je poussais un soupir en me levant pour me placer devant le tableau, vulnérable à toutes les attaques sournoises des élèves insolants qui siégeaient devant moi. Seule le sourire et les yeux entourés de noir semblaient me soutenir. Tous les autres n'affichaient qu'une envie de rire et de pouvoir pratiquer leur art favoris : l'ironie.
- Well. Alice, introce your best friend.
Tout se précipita dans ma tête. Qui était ma meilleure amie ? Marilou ? Dans l'urgence, je n'avais pas vraiment le temps de chercher quelqu'un d'autre. Mais c'est là que je me rendis compte qu'on se disait pas les bonnes choses toutes les deux, qu'on ne parlait pas de nous et que notre amitié n'était qu'artificielle. Cette révélation me fit comme une claque et me laissa sans voix.
- Hum. What's her name ? essaya de m'aider la prof, croyant que je ne comprenais pas.
Alors tant pis, j'ai décidé de me jeter à l'eau, quitte à paraître ridicule, quitte à tout gâcher.
- Her name is Marilou and she is 14. She has got long black hair.
Je retournais les yeux face à la prof, impossible de regarder mon public. Mme James inclinait la tête légèrement, m'encourageant à continuer.

A la fin de mon dialogue, je soulevai lentement mes yeux lourds en direction de Marilou, qui me souriait faiblement, un air mélancolique dans les yeux.
Je retournai m'asseoir à côté d'elle et je vis que ses yeux semblaient un peu humides. J'en fus toute retournée. M'associait-elle à de mauvais souvenirs ?
- Je suis touchée... Gênée mais touchée, me dit Marilou sans me regarder, après s'être éclaircie la voix.
[fin du chapitre 7]

Superbe ! *____*

Thanks ^^

Génial ^^

Chapitre 8
"Sorry Alice but... "

- Mm… What’s your name ? demanda Mme James à Marilou, surprise qu’il y ait un élève de plus dans sa salle.
- My name’s Marilou… répondit-elle.
- Ok, come to the board !
Marilou y allait d’un pas hésitant. Pendant tout le temps où les autres élèves de la classe étaient passés après moi en réussissant plus ou moins, Marilou ne m’avait plus parlé. L’ambiance était alors devenue lourde et pesante, comme si l’air pesait sur nos épaules, et j’étais certaine d’avoir gaffé. Ma tante m’avait pourtant rappelé des millions de fois qu’il ne fallait pas brusquer les gens. Pourquoi l’avais-je donc fait ? J’essayai de retenir mes larmes quand les yeux de Marilou se posèrent sur moi en prononçant des mots horribles, comme des baffes :
- Sorry Alice but… You are not my best friend.
Hilarité générale dans la classe de 4è A et sourire tordu de Mme James. Les profs étaient toujours gênés de voir un élève isolé des autres, mais tous n’aidaient pas cet élève à aller mieux, ils ignoraient la situation, comme si tout allait merveilleusement bien. Je sentais venir les larmes à mes yeux mais je les retenais, certaine que si elles étaient tombées elles auraient alors fait bien plus de dégâts. Toutes ces années où j’ai refusé le courage sans véritable raison, je venais d’en trouver une de la manière forte. Le courage n’offre pas tout. Marilou sembla remarquer les larmes qui envahissaient mes yeux de larmes (sans pour autant se laisser couler sur mes joues) et laissa couler quelque unes des siennes.
- Continue, ordonna Mme James, tentant de ne pas dramatiser.
- My Best Friend is Emily. She’s American. I don’t know exactly where she lives but… She’s wonderful. She’s black-haired. I’ve got an other best friend. her name’s Sally. She was very funny ! I loved her…
Ces découvertes m’étaient douloureuses. Eh oui Alice, la place était déjà prise. Cela ne servait à rien de rêver. Je m’en voulais d’avoir mis une touche de folie, d’imagination dans ma vie en croyant à cette amitié improbable. Après tout, qu’est-ce que je connaissais de Marilou ? Peut-être était-elle comme Kate, après tout ?
Quand elle eut fini son interrogation orale où elle décrocha la même note que moi -dix-huit – je ne pus m’empêcher de lui poser une question qui m’intriguait :
- Marilou, pourquoi tu as parlé de Sally au passé ?

***

Et encore une bouchée de bouillasse sans goût, une. Le repas était sinistre, j’avais encore plus plombé l’atmosphère en posant cette dernière question fatale.
« Rends-toi à l’évidence, Alice, tu n’es et tu ne seras jamais douée en relations humaines, me dis-je en avalant la fin de mon assiette. »
À chaque fois que je levais la tête vers Marilou, elle se mettait aussitôt à regarder avec passion l’immonde plat du jour. Je n’arrivais pas vraiment à comprendre ce qu’il y avait d’insultant dans ma question, mais Marilou ne semblait ni vouloir me l’expliquer, ni me pardonner. Dans ces cas-là, je me demandais vraiment comment l’amitié pouvait fonctionner et surtout comment moi, Alice l’insociable, je pourrais faire des efforts. Après tout c’était elle, et elle seule, qui refusait ma preuve d’amitié surhumaine. C’était donc sa faute si je culpabilisais, mettant en cause mes paroles. Alors cela valait-il réellement la peine d’avoir une amie ainsi ?
C’est à ce moment-là quelque chose de paradoxal se passa : Marilou, qui avait chaussé depuis une heure un masque de mauvaise humeur laissa couler des larmes sur son visage. Elle ne prit même pas la peine de les essuyer, ni de relever la tête pour voir si on l’avait aperçue. Cette larme me mit horriblement mal à l’aise, comme si j’en étais la cause.Comme pour me confirmer cette hypothèse, Marilou laissa retomber mollement sa fourchette qui émit un son strident et commença à pleurer comme je n’avais jamais vu quelqu’un le faire avant. On aurait dit que tout son corps s’abandonnait à sa tristesse, qu’elle venait de vivre la pire des tragédies et je fus terriblement confuse d’être à l’origine de tout ça. Je m’en voulais d’avoir agi ainsi, et je m’en voulais surtout de rester là, immobile à la regarder sans rien faire.
- Marilou…, dis-je enfin d’une voix étranglée, comme si cela avait été moi qui avais pleuré.
Elle ne releva même pas la tête. Même si c’était compréhensible, je lui en voulais un peu au fond de moi. Après tout, elle ne pouvait pas savoir que pour moi, cela avait été un exploit de faire le premier pas pour tout arranger.
Je ne sais pas combien de temps passa entre mon premier mot et l’explication de Marilou car il semblait s’être arrêté pour l’occasion.
- Elle… commença-t-elle avant de pleurer de plus belle.
Je l’encourageais du regard, mais comme elle gardait les yeux fixés sur son assiette, protégée de mon regard par un rideau de cheveux noirs, elle ne se rendit compte de rien. C’était peut-être mieux ainsi.
- … Sally, elle… Elle est morte, il y a deux ans...
J’ouvris des yeux ronds pleins de compassion. Je savais ce que ça faisait de perdre quelqu’un de proche, enfin pas directement. Je sais le vide que ça fait, grâce à mes très chers parents. Alors je posais ma main sur la sienne et Marilou releva la tête brusquement. Elle était agréablement surprise.
- Wooow ! Je vous l’avais dit ! Alice Gilbert est vachement in love de Marilou ! déclara Batiste Saumos depuis sa table, assez fort pour que tout le monde l’entende.
Je soufflais devant ce vieux franglais. Marilou essuya ses larmes et retira sa main de sous la mienne par la même occasion. J’eus alors terriblement honte d’avoir fait ce geste. Après tout peut-être que, comme moi, elle préférerait être seule dans ce genre de situation. Avec une vision d’horreur, je m’imaginais que peut-être que j’avais été aussi lourde et embêtante que Sarah avec moi.
Je savais bien que la curiosité était un vilain défaut mais j’avais très envie d’en savoir plus sur les meilleures amies –dont une plus de ce monde- de Marilou et de savoir si je pouvais me frayer dans leur amitié. Mais peut-être étais-ce horriblement égoïste… Je n’entendis parler Marilou cette journée que lorsque nous étions dans le bus depuis dix bonnes minutes.
- Tu sais ce qui me remonterait le moral ?
- Non, dis-je, surprise qu’elle ait encore l’usage de la parole.
- Ce serait de faire un pyjama party.
Grand yeux. Faible sourire de Marilou. Je n’avais aucune idée, même infime, de ce qu’était une pyjama party.
- Ah oui, c’est une bonne idée, répondis-je hypocritement.
Marilou souria de façon plus déterminée.
- Demain, c’est samedi, me fis-elle remarquer.
Je ne voyais absolument pas le rapport.
- Alors euh, tu voudrais venir chez moi, pour une pyjama party ? proposa-t-elle, les yeux brillants d’envie.
Cela m’aurait brisé le cœur de lui refuser, à elle, qui avait passé la journée à pleurer et que la seule idée d’une pyjama party faisait rêver. Après tout, cela ne devait pas être horrible, une pyjama party.
- Eh bien, volontiers… décidais-je, hésitante.
Marilou sembla mourir de joie. J’étais terriblement fière d’être à l’origine de ces sourires. Alors finalement, je n’étais pas si nulle que ça, en amitié ? Grande nouvelle ! J’étais soulagée de l’apprendre.
- Je t’enverrais un mail avec l’heure et tout…
Aie. Un mail. Le truc qui marche avec Internet ? Avec un ordinateur ? Mentalement, j’essayais de me rappeler où se situait le bouton pour allumer le nôtre. Respire Alice, Sarah pourra t’aider, essayais-je de me résonner. Ce n’était tout de même pas la fin du monde.
- … Alors tu peux me donner ton mail ? continua Marilou.
Re-aie. Si, c’était la fin du monde. Je croyais que, dans toute ma vie, je n’avais entendu qu’une seule fois ce mot, sortit de la bouche de ma tante. « Tu veux une adresse mail ? » m’avait-elle proposé. J’avais répondu que je ne voyais pas à quoi cela pouvait servir et il n’en avait plus jamais été question. Je regrettais mon geste qu’à ce moment-là.
- Hum… Tu ne préfères pas mon numéro de téléphone ? essayais-je, à tout hasard.
Mais je ne savais même plus si un adolescent moderne s’en servait. J’étais vraiment un cas à part, pensais-je tristement. Marilou sembla un peu étonnée de ce renversement de situation mais continua de sourire en sortant un téléphone portable de sa poche.
- Dicte le numéro…
Je lui dictais et elle l’inscrivit dans son répertoire. Puis elle me proposa de faire un jeu sur son portable et de regarder ses photos et vidéos. Il y avait beaucoup de vidéos et de photos de Maxence et je pus confirmer, il était très beau, bien qu’il ne fut pas mon genre. Puis je vis une photo d’Emily qui posait de façon extravagante. Elle avait une coupe très courte noire avec deux longue mèches sur le devant plus longues que les autres violettes. Elle avait des piercings partout et je trouvais cela un peu too much. Puis elle me montra une photo de Sally, qui avait un sourire discret, presque triste. Elle avait des cheveux blonds presque blancs et ses yeux étaient d’un bleu pâle intense et rare. Elle était magnifique. Elles étaient toutes magnifiques. Comment aurais-je pu m’intégrer dans ce groupe ? Et puis, je ne savais même pas qu’un portable avait tant de fonction lors comment pourraient-elles vouloir d’une andouille comme moi ?

Ah enfin la suite!!! Il était temps ^^ Continue j'adore ton histoire!

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Superbe ! *___*